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Poursuite en prestation de sûretés fiscales et rôle du juge de la mainlevée

Poursuite en prestation de sûretés fiscales et rôle du juge de la mainlevée

Jurisprudence
Procédure préalable

Poursuite en prestation de sûretés fiscales et rôle du juge de la mainlevée

5A_252/2020

Résumé : une demande de sûretés fondée sur l’art. 38 LPGIP entrée en force vaut titre de mainlevée définitive. Une poursuite en prestation de sûretés peut être introduite avant que cette demande n’entre en force et avant que l’autorité fiscale ne dispose d’une décision de taxation exécutoire. Le juge de la mainlevée ne peut ni revoir ni interpréter le titre qui lui est soumis, mais doit seulement vérifier s’il ressort de ce titre que le poursuivi a l’obligation de fournir les sûretés et quelle est leur étendue.

 

I. Faits

Une procédure en rappel et soustraction d’impôt est ouverte par l’Administration fiscale cantonale du canton de Genève (AFC) contre A. Dans ce cadre, l’AFC adresse à A. une demande de sûretés, au sens de l’art. 38 LPGIP (RS/GE D 3 18), d’un montant de CHF 154'318'856.-. Le même jour, la demande de sûretés et l’ordonnance de séquestre fiscal sont remises à l’Office des poursuites de Genève, qui exécute le séquestre immédiatement. A. recourt contre cette demande de sûretés jusqu’au Tribunal fédéral.

En parallèle, l’État de Genève fait notifier à A. un commandement de payer pour la somme précitée de CHF 154'318'856.- plus intérêts et frais. Le Tribunal de première instance prononce la mainlevée définitive de l’opposition formée par A. à ce commandement de payer. A. recourt contre ce prononcé auprès de la Cour de justice, sans succès, puis au Tribunal fédéral, qui admet partiellement son recours.

 

II. Droit

Le recourant fait en particulier valoir que la décision querellée contrevient à l’art. 80 LP. Il expose qu’un recours au Tribunal fédéral contre la demande de sûretés était encore pendant lorsque la Cour de justice a statué sur la mainlevée, de sorte que la demande de sûretés n’était pas encore entrée en force, partant, ne valait pas titre de mainlevée définitive (consid. 6.1).

Le Tribunal fédéral rappelle tout d’abord le principe de l’art. 80 al. 1 LP. Dans ce contexte, une demande de sûretés entrée en force vaut titre de mainlevée définitive dans la poursuite en prestation de sûretés (consid. 6.2).

Ensuite, le Tribunal fédéral expose que la poursuite en prestation de sûretés peut parfaitement être introduite avant que la demande de sûretés n’entre en force. De plus, rien n’empêche l’autorité fiscale d’introduire une telle poursuite avant de disposer d’une décision de taxation exécutoire, ceci afin d’obtenir la réalisation des biens visés par les séquestres et de faire consigner le produit de leur réalisation (consid. 6.3).

Enfin, le Tribunal fédéral rappelle que le juge de la mainlevée n’a ni à revoir, ni à interpréter le titre qui lui est soumis, mais doit seulement vérifier s’il ressort du document produit que le poursuivi à l’obligation de fournir les sûretés et, le cas échéant, quelle est l’étendue des sûretés à fournir. Pour le surplus, le point de savoir si, dans le cas d’espèce, la mainlevée définitive pouvait déjà être prononcée au moment où le recours visant la demande de sûretés était encore pendant au Tribunal fédéral peut demeurer indécis. En effet, entre temps, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours de A. contre la demande de sûretés et réduit le montant de ces dernières à CHF 125'179'856.- plus intérêts. Cet arrêt étant entré force, il est indéniable que le poursuivant dispose d’un titre à la mainlevée définitive (consid 6.3).

En conclusion le recours est partiellement admis et l’arrêt attaqué est annulé et réformé en ce sens que la mainlevée définitive est prononcée à concurrence de CHF 125'179'856.- plus intérêts (consid. 6.3).

iusNet LP 03.01.2022